A un clic du pire
En dix ans, l'humanité a regardé l'équivalent de 1,2 million d'années de vidéos pornographiques et 95 % de cette consommation passe par ce que l'on appelle « les tubes », des sites de streaming gratuits. Jamais l'accès au porno n'aura été aussi facile : des millions de contenus sont à disposition de façon permanente, sans restriction d'âge, sans aucune forme de contrôle quant à la violence des contenus diffusés.
La gratuité combinée à l'immédiateté du streaming fait de ces sites un moyen prisé pour accéder aux images explicites, tant par les adultes que... par les mineurs. Car depuis la démocratisation du smartphone, l'âge moyen de la découverte du porno est descendu à 9 ans. 70 % des consommateurs mineurs ont accès à ces contenus, non pas à partir de l'ordinateur de la maison, mais tout simplement à partir de leur téléphone. Ce même téléphone qu'ils emportent chaque jour à l'école et auquel ils ont libre accès lorsqu'ils sont seuls dans leur chambre. Mais pourquoi ces plateformes ne proposent-elles pas de système de filtrage ? Et surtout, pourquoi personne n'en demande-t-il la régulation ? Alors que ces sites figurent parmi les plus fréquentés au monde, au point d'être classés devant Apple et Microsoft, on ne peut qu'être frappé par le silence assourdissant des politiques. Les tubes agissent en toute illégalité, proposent du contenu piraté, ne respectent pas les lois européennes en termes de protection de l'enfance, agissent en toute impunité, sans qu'aucun gouvernement réagisse. C'est pourquoi nous devons nous réapproprier le sujet, sans panique morale mais sans minimiser non plus l'impact de la «porn culture » sur notre sexualité et sur nos rapports de genre. Il est temps pour nous tous d'en comprendre les rouages, de connaître ses moyens de diffusion, de la décoder et d'en évaluer l'impact sur notre rapport au corps et à l'Autre.